Appel pour la défense du droit à l’anonymat sur Internet

Blogueur ou visiteur, je vous invite à soutenir cet appel ici, sur Wikio, en opposition au projet Masson (voir ci-dessous).


Nous tenons à affirmer notre attachement à la liberté d’expression sur Internet, qui a permis à tout un chacun de participer au formidable développement de l’information et des débats sur le réseau.


Une proposition de loi , déposée par le Sénateur Masson , prévoit de remettre en cause le droit à l’anonymat des blogueurs.

Il s'agirait de leur imposer la publication de leur nom, de leur adresse mail, et semble-t-il aussi de leur adresse et de leur numéro de téléphone.

Nous considérons qu’une telle loi porterait atteinte à la liberté d’expression sur Internet.

Les blogueurs qui choisissent l’anonymat le font pour des raisons liées à leur vie professionnelle ou personnelle. Sans cet anonymat beaucoup arrêteraient de bloguer.

Nous appelons les députés et sénateurs à refuser cette proposition de loi, qui contrairement à ce que prétendent ses auteurs, n’apporterait rien en ce qui concerne la protection contre la diffamation, déjà efficacement assurée par la loi actuelle. Rappelons que la loi LCEN fait obligation aux hébergeurs de blogs de supprimer immédiatement les publications litigieuses sur simple demande, et de communiquer le cas échéant à la justice les coordonnées de l’auteur.


Il n’est donc nul besoin d’une loi supplémentaire qui aurait pour seul effet de brider la liberté d’expression des internautes.


Pierre Chappaz, Pdg Wikio
Jean-Baptiste Clot, Pdg Canalblog
Olivier Creiche, PDG d'EZ Embassy (distributeur du service TypePad)
Jean-François Julliard, secrétaire-général de Reporters sans frontières
Frédéric Montagnon, Pdg Over-blog
Tristan Nitot, Président, Mozilla Europe
Philippe Pinault, Pdg Blogspirit
Jeremie Zimmermann et Philippe Aigrain, La Quadrature du Net


(Pour soutenir cet appel, vous pouvez laisser un commentaire signé de votre nom ou de votre pseudo, et indiquer l’adresse de votre blog si vous êtes blogueur. N’hésitez pas à relayer l’initiative sur votre blog, plus nous serons nombreux, plus nous aurons de chances d’être entendus !)

S'entraîner : sujet BTS blanc Générations

BTS BLANC – CGO


Première partie : Synthèse
Vous rédigerez une synthèse objective et ordonnée des documents suivants :
• Document 1 : Gérard Vincent, Le Peuple lycéen, Gallimard,1974.
• Document 2 : François de singly, «L'invention privée de nouvelles façons de "vivre ensemble" », Le Monde (20 août 1998)
• Document 3 : MONTAIGNE, Essais, Livre premier, chap. XXVIII, 1580-1595
• Document 4 : Saturne dévorant un de ses enfants, tableau de Francisco Goya (1746-1828), peint entre 1819 et 1823

Deuxième partie : écriture personnelle
Vous répondrez d’une façon argumentée et ordonnée à la question suivante, en vous appuyant sur les textes du corpus et sur vos lectures personnelles :
Comment vous situez-vous par rapport aux générations antérieures ?




• Document 1 : Gérard Vincent, Le Peuple lycéen, Gallimard,1974.
La méfiance - inavouée - des pères à l'égard de l'impatience des fils n'est pas historiquement nouvelle. Ce qui est plus nouveau, c'est sans doute le sentiment de culpabilité qui imprègne les mentalités adultes. Non seulement les parents commencent - enfin - à se sentir responsables de la naissance de leurs enfants (alors que dans les générations précédentes on exigeait que les enfants fussent « reconnaissants » à l'égard de leurs géniteurs) mais aussi ils tendent à se percevoir comme coupables de Katyn, d'Auschwitz, d'Hiroshima, des guerres menées par la France en Indochine et en Algérie et même des bombardements américains au Viêt-Nam et de la misère du Tiers-Monde. Ceux qui avaient vingt ans en 1940 ont rencontré des choix embarrassants : Pétain ou de Gaulle (le plus souvent d'ailleurPétain, « puis » de Gaulle), la Libération (révolution ou restauration ?), la décolonisation, mai 1968, etc., c'est-à-dire tous ces grands événements nationaux qui, depuis trente ans, ont trouvé les Français divisés. Combien d'adultes ressentent la honte d'avoir fait de « mauvais » choix et reconstruisent - à l'intention de leurs enfants notamment - une sorte d'autobiographie imaginaire où leur attentisme de 1940-1944 se transforme en épopée de la Résistance ? Combien d'adultes balancent entre une éducation « permissive » à laquelle les convie un freudisme sommaire qui fait partie des idées du moment (mais alors, ne seront-ils pas considérés comme des parents « démissionnaires » ?) et une éducation traditionnelle et autoritaire (mais alors, ne seront-ils pas perçus comme des parents « répressifs », comme des « pères-flics » ?). Le procès du père s'instruit quotidiennnement à la table familiale : le discours de cet homme, bien nanti mais « de gauche », prône le bouleversement de la société tout entière mais se mue en une incitation à être « raisonnable », en une dénonciation de toutes les utopies spontanéistes lorsque son fils veut descendre dans la rue pour « changer la vie » dans le sens précisément préconisé par le père. Le propos de ce chef de famille catholique et cossu est contesté par sa fille qui lui reproche de parler dix fois plus souvent de l'argent que de Dieu.
La sévérité avec laquelle les adultes - ou certains d'entre eux - se perçoivent reste très en deçà du réquisitoire que les jeunes prononcent contre eux. Puisque enseignement et éducation restent sous-tendus par une conception volontariste de l'existence (le monde est malléable à la volonté humaine et l'homme apte à contrôler - sinon à susciter - l'événement), il en découle que le fils tient le père pour responsable des horreurs de la guerre et des insuffisances de la paix. Certes le père peut répondre que lui-même n'a pas demandé à naître, qu'il a été jeté à vingt ou trente ans dans la Seconde Guerre mondiale, qu'il a hérité lui aussi de l'impuissance de la génération précédente, qu'il n'est pas sûr, après tout, que l'humanité ne se pose que les problèmes qu'elle peut résoudre ; que le fils en le dénonçant comme responsable sera jugé comme tel par sa propre descendance. Vain discours puisque la société de consommation a accouché de cet enfant naturel : une jeunesse non culpabilisée qui fait allègrement son procès car, dépourvue du sens de son propre péché, elle a - au plus haut degré - le sens du péché de l'autre (de l'adulte) et celui du péché des nantis (des pays riches responsables de la misère du Tiers-Monde).

• Document 2 : François de singly, «L'invention privée de nouvelles façons de "vivre ensemble" », Le Monde (20 août 1998)

À écouter ou lire certains discours de gauche comme de droite, il y aurait crise du lien social dans notre société. Ce serait une évidence. Et il y aurait un responsable : « C'est la faute aux parents. » Parce que les parents ne sont pas assez autoritaires, pas assez sévères avec leurs enfants, la société irait mal. Alors, on menace de suspendre ou de mettre sous tutelle les prestations sociales des parents de délinquants, et surtout on rappelle à longueur de commentaire que le retour à l'ordre dans la famille, garant du bon fonctionnement dans la société, demande une plus grande place accordée au père. La part trop grande donnée aux mères aurait contribué à un tel état de confusion familiale.
Ainsi, on remonte une des pièces idéologiques du XIXe siècle. En effet, les opposants à la Révolution française estimaient qu'en tuant le roi on avait tué le père, et que la société était sur le déclin. Ils réclament alors que l'autorité du père soit rétablie, espérant que, derrière le retour du père, puisse avoir lieu le retour du roi et le retour de Dieu. Dans une telle optique, vivre ensemble demande avant tout obéissance et soumission. La famille, «cellule de base de la société», doit d'abord mettre en œuvre en son sein de telles relations : un père, avec l'autorité, une mère, soumise, et les enfants, eux aussi soumis pour toute leur vie. Le groupe familial l'emporte sur les individus qui le composent.
Aujourd'hui, ceux et celles qui gémissent sur les méfaits du temps font des rêves comparables : si seulement la famille pouvait revenir comme avant, avec un père au centre et des enfants obéissants, la société française se porterait mieux. Un tel raisonnement oublie l'essentiel : les parents doivent préparer leurs enfants à être des adultes qui pourront vivre dans la société de demain. Or toutes les prévisions nous annoncent que le monde de demain demandera des individus autonomes, capables de faire preuve de « flexibilité » dans leurs parcours professionnels. Et on voudrait que ces individus aient une personnalité à l'ancienne, définie en priorité par la vertu de l'obéissance !
Étrange aveuglement nostalgique qui nous interdit de réfléchir à notre avenir! La question de « vivre ensemble » en cette fin de XXe siècle réclame de l'imagination. Contrairement à certaines apparences, les familles contemporaines ont su inventer de nouvelles relations au sein desquelles les enfants apprennent à être autonomes en participant aux décisions familiales — toutes les enquêtes de décision d'achat le montrent -, en ayant droit à certains territoires personnels. Dans la majorité des cas, ces enfants doivent aussi contribuer à l'intérêt collectif, défini par le travail et la réussite de chacun. Ils doivent donc travailler à l'école. S'est mise en place progressivement une nouvelle famille qui respecte chacun, y compris dans son avenir (ce qui n'exclut pas certaines contraintes).
© Le Monde

• Document 3 : MONTAIGNE, Essais, Livre premier, chap. XXVIII, 1580-1595

Des enfants aux pères, c'est plutôt respect. L'amitié se nourrit de communication qui ne peut se trouver entre eux pour la trop grande disparité, et offenserait à l'aventure les devoirs de nature. Car ni toutes les secrètes pensées des pères ne se peuvent communiquer aux enfants pour n'y engendrer une messéante privauté [une familiarité déplacée], ni les avertissements et corrections qui est un des premiers offices [devoirs] d'amitié, ne se pourraient exercer des enfants aux pères. Il s'est trouvé des nations où, par usage, les enfants tuaient leurs pères, et d'autres où les pères tuaient leurs enfants, pour éviter l'empêchement qu'ils se peuvent quelquefois entreporter, et naturellement l'un dépend de la ruine de l'autre. Il s'est trouvé des philosophes dédaignant cette couture [ce lien] naturelle, témoin Aristippe : quand on le pressait de l'affection qu'il devait à ses enfants pour être sortis de lui, il se mit à cracher, disant que cela en était aussi bien sorti; que nous engendrions bien des poux et des vers. Et cet autre, que Plutarque voulait induire à s'accorder [se réconcilier] avec son frère : « Je n'en fais pas, dit-il, plus grand état pour être sorti de même trou. » C'est, à la vérité, un beau nom et plein de dilection [attrait] que le nom de frère, et à cette cause en fîmes-nous, lui et moi, notre alliance. Mais ce mélange de biens, ces partages, et que la richesse de l'un soit la pauvreté de l'autre, cela détrempe merveilleusement et relâche cette soudure fraternelle. Les frères ayant à conduire le progrès de leur avancement en même sentier et même train, il est forcé qu'ils se heurtent et choquent souvent. Davantage, la correspondance et relation qui engendre ces vraies et parfaites amitiés, pourquoi se trouvera-t-elle en ceux-ci? Le père et le fils peuvent être de complexion entièrement éloignée, et les frères aussi. C'est mon fils, c'est mon parent, mais c'est un homme farouche, un méchant ou un sot. Et puis, à mesure que ce sont amitiés que la loi et l'obligation naturelle nous commandent, il y a d'autant moins de notre choix et liberté volontaire. Et notre liberté volontaire n'a point de production qui soit plus proprement sienne que celle de l'affection et amitié. Ce n'est pas que je n'aie essayé de ce côté-là tout ce qui en peut être, ayant eu le meilleur père qui fut [pourtant], et le plus indulgent, jusques à son extrême vieillesse, et étant d'une famille fameuse de père en fils, et exemplaires en cette partie de la concorde fraternelle.

• Document 4 : Saturne dévorant un de ses enfants, tableau de Francisco Goya (1746-1828), peint entre 1819 et 1823 

Césaire, Senghor et la Négritude (Une génération ne se définit-elle que par rapport à celle(s) qui la précède(nt) ? -2-)



Au cours de notre réflexion, il est apparu que, bien l'on pense souvent de prime abord à une relation d'opposition, il arrive qu'une génération tente de se définir par rapport à celle qui la précède dans un rapport d'héritage, une recherche de racines. On peut ainsi citer le mouvement de la "Négritude", initié par Aimé Césaire et  Léopold Sedar Senghor : « La Négritude est la simple reconnaissance du fait d’être noir, et l’acceptation de ce fait, de notre destin de Noir, de notre histoire et de notre culture ».

Extraits :

Aimé Césaire, Cahier d'un retour au pays natal (1939)

" ô lumière amicale
ô fraîche source de la lumière
ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni la boussole
ceux qui n'ont jamais su dompter la vapeur ni l'électricité
ceux qui n'ont exploré ni les mers ni le ciel
mais ceux sans qui la terre ne serait pas la terre
gibbosité d'autant plus bienfaisante que la terre déserte
davantage la terre
silo où se préserve et mûrit ce que la terre a de plus terre
ma négritude n'est pas une pierre, sa surdité ruée contre la clameur du jour
ma négritude n'est pas une taie d'eau morte sur l'œil mort de la terre
ma négritude n'est ni une tour ni une cathédrale elle plonge dans la chair rouge du sol elle plonge dans la chair ardente du ciel elle troue l'accablement opaque de sa droite patience.

[...]

Écoutez le monde blanc
horriblement las de son effort immense
ses articulations rebelles craquer sous les étoiles dures
ses raideurs d'acier bleu transperçant la chair mystique
écoute ses victoires proditoires trompeter ses défaites
écoute aux alibis grandioses son piètre trébuchement
Pitié pour nos vainqueurs omniscients et naïfs !"

Léopold Sédar Senghor, Femme noire

"Femme nue, femme noire
Vétue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté
J'ai grandi à ton ombre; la douceur de tes mains bandait mes yeux
Et voilà qu'au coeur de l'Eté et de Midi,
Je te découvre, Terre promise, du haut d'un haut col calciné
Et ta beauté me foudroie en plein coeur, comme l'éclair d'un aigle
Femme nue, femme obscure
Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais
lyrique ma bouche
Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du
Vent d'Est
Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueur
Ta voix grave de contralto est le chant spirituel de l'Aimée
Femme noire, femme obscure
Huile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l'athlète, aux
flancs des princes du Mali
Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta
peau.
Délices des jeux de l'Esprit, les reflets de l'or ronge ta peau qui se moire
A l'ombre de ta chevelure, s'éclaire mon angoisse aux soleils prochains
de tes yeux.
Femme nue, femme noire
Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l'Eternel
Avant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les
racines de la vie."

On peut également évoquer bien entendu le mouvement du Black Power aux États-Unis. 
 

Une génération ne se définit-elle que par rapport à celle(s) qui la précède(nt) ? -1-

Voici le sujet que nous avons travaillé avec mes étudiants. Au cours de notre réflexion, il est apparu nécessaire de convoquer en référence la génération de 1830, et en particulier ce célèbre texte de Musset, extrait des Confessions d'un enfant du siècle.

Rappel : les dates à connaître pour la compréhension de ce texte :
1789 Révolution. Instauration de la République
1804-1815 Empire : Napoléon Ier
1815 - 1830 Restauration : Louis XVIII monte sur le trône, retour de la dynastie régnante avant la Révolution
1830 : Révolution de Juillet. Au lieu de permettre un retour à la République, cette révolution conduit à un nouveau système monarchique : la Monarchie de Juillet.

"Pendant les guerres de l’empire, tandis que les maris et les frères étaient en Allemagne, les mères inquiètes avaient mis au monde une génération ardente, pâle, nerveuse. Conçus entre deux batailles, élevés dans les collèges aux roulements de tambours, des milliers d’enfants se regardaient entre eux d’un œil sombre, en essayant leurs muscles chétifs. De temps en temps leurs pères ensanglantés apparaissaient, les soulevaient sur leurs poitrines chamarrées d’or, puis les posaient à terre et remontaient à cheval.
Un seul homme était en vie alors en Europe ; le reste des êtres tâchait de se remplir les poumons de l’air qu’il avait respiré. Chaque année, la France faisait présent à cet homme de trois cent mille jeunes gens ; et lui, prenant avec un sourire cette fibre nouvelle arrachée au cœur de l’humanité, il la tordait entre ses mains, et en faisait une corde neuve à son arc ; puis il posait sur cet arc une de ces flèches qui traversèrent le monde, et s’en furent tomber dans une petite vallée d’une île déserte, sous un saule pleureur.
Jamais il n’y eut tant de nuits sans sommeil que du temps de cet homme ; jamais on ne vit se pencher sur les remparts des villes un tel peuple de mères désolées ; jamais il n’y eut un tel silence autour de ceux qui parlaient de mort. Et pourtant jamais il n’y eut tant de joie, tant de vie, tant de fanfares guerrières dans tous les cœurs ; jamais il n’y eut de soleils si purs que ceux qui séchèrent tout ce sang. On disait que Dieu les faisait pour cet homme, et on les appelait ses soleils d’Austerlitz. Mais il les faisait bien lui-même avec ses canons toujours tonnants, et qui ne laissaient de nuages qu’aux lendemains de ses batailles.
C’était l’air de ce ciel sans tache, où brillait tant de gloire, où resplendissait tant d’acier, que les enfants respiraient alors. Ils savaient bien qu’ils étaient destinés aux hécatombes ; mais ils croyaient Murat invulnérable, et on avait vu passer l’empereur sur un pont où sifflaient tant de balles, qu’on ne savait s’il pouvait mourir. Et quand même on aurait dû mourir, qu’était-ce que cela ? La mort elle-même était si belle alors, si grande, si magnifique, dans sa pourpre fumante ! Elle ressemblait si bien à l’espérance, elle fauchait de si verts épis qu’elle en était comme devenue jeune, et qu’on ne croyait plus à la vieillesse. Tous les berceaux de France étaient des boucliers ; tous les cercueils en étaient aussi ; il n’y avait vraiment plus de vieillards ; il n’y avait que des cadavres ou des demi-dieux.
[...]
 Les enfants sortirent des collèges, et ne voyant plus ni sabres, ni cuirasses, ni fantassins, ni cavaliers, ils demandèrent à leur tour où étaient leurs pères. Mais on leur répondit que la guerre était finie, que César était mort, et que les portraits de Wellington et de Blücher étaient suspendus dans les antichambres des consultats et des ambassades, avec ces deux mots au bas : Salvatoribus mundi.
Alors s’assit sur un monde en ruines une jeunesse soucieuse. Tous ces enfants étaient des gouttes d’un sang brûlant qui avait inondé la terre ; ils étaient nés au sein de la guerre, pour la guerre. Ils avaient rêvé pendant quinze ans des neiges de Moscou et du soleil des Pyramides ; on les avait trempés dans le mépris de la vie comme de jeunes épées. Ils n’étaient pas sortis de leurs villes, mais on leur avait dit que par chaque barrière de ces villes on allait à une capitale d’Europe. Ils avaient dans la tête tout un monde ; ils regardaient la terre, le ciel, les rues et les chemins ; tout cela était vide, et les cloches de leurs paroisses résonnaient seules dans le lointain.
[...]

Les enfants regardaient tout cela, pensant toujours que l’ombre de César allait débarquer à Cannes et souffler sur ces larves ; mais le silence continuait toujours, et l’on ne voyait flotter dans le ciel que la pâleur des lis. Quand les enfants parlaient de gloire, on leur disait : Faites-vous prêtres ; quand ils parlaient d’ambition : Faites-vous prêtres ; d’espérance, d’amour, de force, de vie : Faites-vous prêtres.
Cependant, il monta à la tribune aux harangues un homme qui tenait à la main un contrat entre le roi et le peuple ; il commença à dire que la gloire était une belle chose, et l’ambition et la guerre aussi ; mais qu’il y en avait une plus belle, qui s’appelait la liberté.
Les enfants relevèrent la tête et se souvinrent de leurs grands-pères, qui en avaient aussi parlé.
[...]

Trois éléments partageaient donc la vie qui s’offrait alors aux jeunes gens : derrière eux un passé à jamais détruit, s’agitant encore sur ses ruines, avec tous les fossiles des siècles de l’absolutisme ; devant eux l’aurore d’un immense horizon, les premières clartés de l’avenir ; et encore ces deux mondes... quelque chose de semblable à l’Océan qui sépare le vieux continent de la jeune Amérique, je ne sais quoi de vague et de flottant, une mer houleuse et pleine de naufrages, traversée de temps en temps par quelque blanche voile lointaine ou par quelque navire soufflant une lourde vapeur ; le siècle présent, en un mot, qui sépare le passé de l’avenir, qui n’est ni l’un ni l’autre et qui ressemble à tous deux à la fois, et où l’on ne sait, à chaque pas qu’on fait, si l’on marche sur une semence ou sur un débris.
Voilà dans quel chaos il fallut choisir alors ; voilà ce qui se présentait à des enfants pleins de force et d’audace, fils de l’empire et petits-fils de la révolution.
Or, du passé, ils n’en voulaient plus, car la foi en rien ne se donne ; l’avenir, ils l’aimaient, mais quoi ? comme Pygmalion Galathée ; c’était pour eux comme une amante de marbre, et ils attendaient qu’elle s’animât, que le sang colorât ses veines.
Il leur restait donc le présent, l’esprit du siècle, ange du crépuscule, qui n’est ni la nuit ni le jour ; ils le trouvèrent assis sur un sac de chaux plein d’ossements, serré dans le manteau des égoïstes, et grelottant d’un froid terrible. L’angoisse de la mort leur entra dans l’âme à la vue de ce spectre moitié momie et moitié foetus ; ils s’en approchèrent comme le voyageur à qui l’on montre à Strasbourg la fille d’un vieux comte de Saverdern, embaumée dans sa parure de fiancée. Ce squelette enfantin fait frémir, car ses mains fluettes et livides portent l’anneau des épousées, et sa tête tombe en poussière au milieu des fleurs d’oranger.
[...]

Mais la jeunesse ne s’en contentait pas.[...]
Un sentiment de malaise inexprimable commença donc à fermenter dans tous les cœurs jeunes."

Génération Y : Un article dans la Voix du Nord

"Ferez-vous une place à la génération Y ?"

"Les sociologues ont baptisé « génération Y » les jeunes de 15 à 31 ans. Ils représenteront près d'un actif sur deux en 2015. Évidemment, les Y ne pensent pas comme leurs parents ou leurs employeurs. Immersion dans la tête d'un Y [...]

 L'article peut être consulté ici

Les "jeunes " et la politique : Libération, 11 février 2010

























L'engagement politique des jeunes : c'est le thème que se proposait d'explorer le quotidien Libération le jeudi 11 février, à travers une interview de la politologue Anne Muxel, auteur de Avoir 20 ans en politique.
L'article est consultable en ligne sur


L'interview est à lire, bien entendu, ne serait-ce que pour son analyse des nouvelles formes d'engagement qui seraient propres à une génération.
Cependant, il est véritablement regrettable, d'un point de vue scientifique, qu'aucun élément de comparaison ne soit véritablement donné :  il aurait été intéressant de pouvoir comparer les chiffres de l'abstention des "jeunes" avec l'abstention de  la génération précédente au même âge, ou encore  les comportements d'électeurs appartenant à des classes d'âge différentes lors d'une même élection . Ceci n'est fait que trop rapidement, au détour d'une phrase : "6 Français sur 10 ne se sont pas déplacés non plus."

Par ailleurs, les analyses de l'INSEE nuancent les affirmations de Mme Muxel: voici quelques données que j'ai sélectionnées. Pour les étudiants, il peut être intéressant de se demander en quoi elles complètent ou apportent un contre-point à l'article...

Doc 1.

Champ : électeurs inscrits en France métropolitaine.
Source : Insee, fichier national des électeurs, mars 2007.

 Doc. 2.

Ainsi pour les élections présidentielles de 2007 :  "Les jeunes se sont inscrits en nombre. En 2007, en métropole, près de 1,4 million de personnes sont inscrites pour la première fois sur les listes, soit 3,4 % du corps électoral.
Le facteur démographique et l’inscription d’office des jeunes qui ont atteint 18 ans en 2006 ne suffisent pas à expliquer l’ampleur du phénomène. En effet, les inscriptions d’office ne représentent que 40 % des nouvelles inscriptions. Au-delà, 830 000 électeurs sont venus d’eux-mêmes se faire enregistrer fin 2006 : la moitié sont âgés de moins de 30 ans et un quart ont entre 30 et 39 ans (graphique 2). La proportion de nouveaux inscrits atteint 6 % parmi les 18-24 ans (hors inscription d’office), 5 % parmi les 25-29 ans et 4 % parmi les 30-34 ans. Ce mouvement d’inscription des générations récentes à la veille du scrutin présidentiel de 2007 illustre a contrario la position de retrait qu’une partie d’entre elles avait adoptée au cours des années passées. Il s’agit un peu plus souvent d’hommes, dans 52 % des cas, alors que les hommes ne représentent que 47 % du corps électoral." (Insee)

Doc. 3.
Participation aux élections présidentielles de 2002 et 2007 selon la génération
(1er tour,  2ème tour)
                                              2007              2002



Génération 1920             76,8       78,2       73,0       79,8
Génération 1930             87,5       87,9       81,0       86,3
Génération 1940             91,0       90,8       79,7       86,4
Génération 1950             89,9       89,6       76,5       85,3
Génération 1960             87,4       88,1       72,3       81,6
Génération 1970             84,5       84,0       63,7       73,9
Génération 1980             80,9       79,8       68,4       78,1

Doc. 4.















Les générations, un objet publicitaire : les seniors

Peut-on observer une évolution de la place laissée à la génération des seniors à travers le rôle que lui donne la publicité? 













De la Mère Denis (années 70', 80')...



...à Dove (2004) ...








Evian,  en 2001



Mamie Nova 1986...





à comparer avec la version 2003  :


retrouver ce média sur www.ina.fr


Et celle-ci? A votre avis, quelle vision des générations cherche-t-elle à transmettre? (Lacroix, 1988)



Voici une autre sélection (à compléter) proposée par le site INA.fr :


retrouver ce média sur www.ina.fr


Par ailleurs, les seniors constituent de plus en plus une cible de choix pour les publicitaires :


Voici ce qu'en dit un article très intéressant  proposé par "Le Hub", site de la Poste se définissant comme  "le média de la performance client".

Vous noterez qu'à travers cet article, ce n'est pas une, mais plusieurs générations de seniors qui apparaissent.
Cet article s'accompagne d'une interview  de Nicole Pochat, Directrice Communication et Marketing d’Europ Assistance France qui explique comment sa société cible le marché des seniors.


Comment les marques s’adaptent au marché des seniors
Le nombre de nouveaux produits destinés aux plus de 50 ans double chaque année. Les clés pour comprendre les stratégies commerciales et marketing en œuvre.
La façon dont les marques segmentent les seniors
Quelques chiffres pour comprendre l’intérêt des marques pour le marché des seniors
Même s’il existe de fortes disparités au sein des plus de 50 ans, les seniors ont en moyenne des revenus supérieurs d’un tiers à ceux des moins de 50 ans. Le poids de leur consommation se retrouve dans la plupart des secteurs : alimentation, tourisme, équipement de la maison, informatique, téléphonie, etc.
• Ils représentent ainsi 50 % du marché des produits de beauté, ils achètent la moitié des voitures neuves, et même 80 % des voitures haut de gamme.
• Ils représentent 64 % des acheteurs de yaourts bio, 42 % des acheteurs de plats cuisinés allégés, 57 % des acheteurs de chocolat noir à croquer, 62,3 % de la consommation de vin, 61,2 % de la consommation d’huile d’olive, 51,2 % des cafés torréfiés….
La vision de Redcats Senior Brands (groupe PPR)
Le marché des plus de 50 ans est pourtant loin d’être homogène et requiert une segmentation par tranches d’âges. C’est l’approche, par exemple, de Redcats Senior Brands. Avec trois marques, Daxon, Edmée et Celaia, cette filiale du groupe PPR est le leader en France de la vente à distance spécialisée senior.
Sa cible historique est constituée par les femmes de plus de 65 ans. Avec une première segmentation : les 65-85 ans qui recherchent des vêtements adaptés à leurs goûts et à leur corps, mais en refusant les signes de la vieillesse, et les plus de 85 ans. « À partir de cet âge, les femmes se décrivent elles-mêmes comme des “vieilles dames” » relève Catherine Belmont, responsable du département Etudes et Marketing et gestion de fichiers de Daxon - Redcats Senior Brands.
L’enseigne s’est lancée à la conquête d’une nouvelle cible, les jeunes seniors de 50-65 ans. « À cet âge, les femmes entrent dans une phase de transition où s’opèrent des changements de vie : départ des enfants, retraite, ménopause, évolution de la silhouette, explique Catherine Belmont. Elles ont le regard tourné vers les 35-45 ans mais de nouvelles contraintes, comme la prise de poids ou le ridicule du jeunisme, les obligent à évoluer. » Pour séduire ces baby-boomeuses, Redcats Senior Brands a lancé une nouvelle marque Celaia. Les jeunes seniors n’adhéraient pas à l’image de Daxon, associée au troisième âge. Alors que Celaia, tout en proposant des vêtements adaptés, s’inscrit dans une mode « coup de cœur », dans un univers de plaisir autour des dernières tendances.
Trois, voire quatre, segments de seniors
L’exemple de Daxon illustre la segmentation habituellement retenue par les marques vis-à-vis des seniors : trois, parfois quatre, segments qui correspondent à des générations bien distinctes, chacune avec ses valeurs propres, ses besoins et ses envies de consommation, son rapport aux marques.
Agence spécialisée sur le marché des seniors, Senioragency propose comme segmentation :
• Les happy-boomers (50 - 60 ans) : 8 000 000 consommateurs. Nés après guerre, ils sont les enfants de la société de consommation et de l’innovation. Ils ne ressemblent en rien à leurs aînés.
• Les libérés (60 - 75ans) : 7 700 000 consommateurs. Enfants de la Libération, ils sont aujourd’hui à la retraite. Libérés de toute contrainte, ils en profitent pour réaliser tout ce qu’ils n’ont pu faire auparavant et qu’ont fait les happy-boomers à 20 ans comme les voyages, les loisirs, etc.
• Les paisibles (75 - 85 ans) : 3 800 000 consommateurs. Les vrais seniors qui consomment des produits de seniors.
• Les TGV (85 ans et +) : 1 100 000 Très Grands Vieillards. Leur consommation est réalisée par leurs enfants "happy-boomers" et "libérés".
Pour aller plus loin dans l’analyse du marché des seniors, voir sur ce site le décryptage effectué par Hervé Sauzay, directeur du département Générations et Modes de Vie, de Bayard
En France, la distribution hésite à cibler les seniors
Une certaine indifférence de la part des distributeurs Si les marques ont intégré la cible seniors dans leur marketing, la grande distribution se montre en France encore hésitante à franchir le pas d’une approche dédiée. D’après une étude du Centre d’étude sur le commerce et la distribution, menée il y a quelques années auprès de 800 entreprises de distribution, et citée par le blog Nouveau Marketing : – 5,9 % seulement des distributeurs connaissent l’âge de leurs clients ; – 5,2 % estiment que les seniors ont des besoins particuliers ; – 2,4 % tiennent compte des besoins des seniors dans leur infrastructure ; – 1 % ont l’intention de faire une étude sur cette cible.
Mais ailleurs dans le monde, les initiatives se multiplient
À l’étranger, les distributeurs ne craignent pas s’adresser spécifiquement aux seniors. Au Japon, par exemple, la chaîne de magasins de proximité franchisés, Daiei Lawson, teste des lieux de vente spécialement aménagés pour les seniors, imitant son principal concurrent, Seven-Eleven Japan Co, qui a déjà adapté certains de ses magasins. Plus proche de nous, chez nos voisins européens, des petites et des grandes surfaces conçues pour les seniors existent depuis plusieurs années : le Seniorenfachmarkt Deliga, en Allemagne près de Dresde, le magasin « Adeg Aktiv Markt 50+ » en Autriche près de Salzbourg, « Tienda del Abuelo », une chaîne de magasins franchisés en Espagne, etc.
Ces magasins se distinguent par leur offre proposant, en plus des produits de consommation courante, des articles spécifiquement adaptés aux seniors, comme des loupes de lecture ou des chaussures de confort. Mais ils se caractérisent surtout par leur aménagement : des allées plus larges, une lumière plus douce, des salles de repos, des étiquettes en plus gros caractères… Ce plus grand confort est d’ailleurs apprécié au-delà des seniors, puisque ces magasins expliquent être fréquentés par un public plus large.
Les baby-boomers restent cependant une cible bien spécifique
Alors que ces magasins spécialisés ciblent les tranches les plus âgées de seniors, Gap a essayé de conquérir le marché des jeunes seniors en lançant aux Etats-Unis une chaîne dédiée, Forth & Townes : des magasins confortables mais aussi très tendance pour séduire les nouvelles baby-boomeuses. Forth & Townes avait même veillé à recruter des vendeuses plus âgées que dans d’autres enseignes, pour mettre à l’aise les clientes et mieux les conseiller.
Mais cette expérience n’a duré que 18 mois, Gap annonçant début 2007 la fermeture des magasins Forth & Townes. Comme l’analyse le Washington Post, cet échec est en partie imputable aux difficultés que la maison-mère rencontre sur ses autres segments de clientèle : ses résultats étant globalement en baisse, Gap était devenu réticent à poursuivre les investissements pour développer sa chaîne de magasins seniors. Mais il faut aussi noter que les ventes de Forth & Townes étaient en deçà des objectifs. Même si les lieux de vente s’inscrivaient dans un univers résolument moderne, les jeunes seniors semblent avoir eu peur de se voir enfermées sous une étiquette qu’elles récusent.
L’innovation produit et service pour séduire les plus de 50 ans
90% de croissance pour les nouveaux produits destinés aux seniors En faisant abstraction des produits spécialisés destinés au grand âge (audition, déplacement, etc.), le rythme de lancement de nouveaux produits conçus pour les seniors s’accélère fortement. Selon la société spécialisée dans le conseil en sciences de la vie, Alcimed, cette croissance était de 30 % entre 2002 et 2003, 40% entre 2003 et 2004 et de 90% entre 2005 et 2006 (avec 553 nouveaux produits en 2006). Cette forte augmentation s’est poursuivie en 2007 : sur les cinq premiers mois de l’année uniquement, le lancement de nouveaux produits pour seniors a progressé de 64 % par rapport à la même période en 2006.
Des produits plus pratiques mais aussi résolument modernes
Schématiquement, les produits conçus pour les seniors vont mettre en avant la praticité, la simplicité, le confort d’utilisation. C’est par exemple le PC Ordissimo, un ordinateur qui séduit une clientèle à 80 % senior grâce à une approche très simplifiée de l’informatique comme des touches spécifiques pour les fonctions « copier » et « coller ». Mais il faut se garder d’une vision trop réductrice vis-à-vis des attentes des seniors. Ainsi l’appareil photo numérique HP Photosmart R847 : il propose bien sûr une très grande simplicité d’utilisation pour séduire cette cible, mais il y ajoute une fonction qui permet de rajeunir le sujet pris en photo ! Un « effet lifting » qui gomme rides et imperfections du visage. Une autre option permet d’amincir une personne prise en photo…
Après 50 ans, l’envie de séduire ne s’estompe pas
L’industrie cosmétique l’a bien compris. TNS Sofres rappelle que l’un des plus grands lancements de Revlon aux Etats-Unis ces dix dernières années a été Vital Radiance, une ligne de maquillage destinée aux femmes de plus de cinquante ans. Les formules sont hydratantes, les ombres à paupière plus faciles à appliquer sur des paupières ridées, leurs couleurs plus douces. Les packagings et les modes d’application sont adaptés à des mains moins adroites. Les modes d’emploi sont plus lisibles et plus détaillés.
Des services associés pour accompagner les seniors
En lançant sa marque Vital Radiance, Revlon a également ouvert une hot line dédiée pour les consommatrices afin de leur apporter des conseils sur le maquillage après 50 ans. Mettre en place des services pour accompagner les seniors est une tendance chez les entreprises. On le retrouve ainsi par exemple dans la Carte Senior de la SNCF Cette carte a tous les attributs de la carte de fidélisation : des réductions pour les plus de 60 ans, couplées avec le programme S’miles. Mais elle fait aussi entrer le senior dans un univers de services. Comme la possibilité de recevoir par courrier ou par e-mail une « feuille de voyage » qui récapitule toutes les étapes du déplacement (plan des gares, horaires, placement à l’intérieur du train…) ou encore l’envoi de SMS en cas de perturbation. La Carte Senior apporte aussi des facilités et des réductions pour le transport des bagages de porte à porte, ainsi que pour le service d’accompagnement des voyageurs de leur domicile jusqu’au train. Au-delà des services adaptés, la clientèle des seniors demande aussi une façon adaptée de rendre le service. Comme l’explique au magazine L’Expansion Alexandre Vielle, président de la société qui commercialise les ordinateurs Ordissimo : « Nous avons gardé notre service après-vente en interne, afin d’être au plus près des besoins de nos clients. Pour la hot line, nous formons nos collaborateurs à la patience et à l’écoute, et, dans notre aide à distance, nous pouvons prendre la main sur l’ordinateur. »
Vers un label « produit senior » ?
Aux Etats-Unis, la société Home Depot d’aménagement de la maison a signé en 2005 un accord avec l’association de seniors AARP, forte de 36 millions de membres, visant à labelliser des produits pour les plus de 50 ans (facilité d’assemblage, serrage et dévissage faciles, notices d’utilisation lisibles…).
Mais ici aussi, les réticences des entreprises restent fortes en France. « Prenez l’exemple de l’automobile, commente Senioragency. Le mot d’ordre de nos constructeurs nationaux est de conquérir les jeunes avec des publicités décalées, même pour des produits qui sont manifestement destinés aux seniors comme la Modus de Renault ou la 1007 de Peugeot. Pendant ce temps, les constructeurs asiatiques sont omniprésents dans les médias consommés par les seniors avec des publicités très informatives. Résultat des courses : les ventes se font attendre pour la Modus et la 1007 alors que la progression des asiatiques est fulgurante. »
Genius et les services à la personne
Des services simples, accessibles, proposés dans le cadre d’un forfait pour un usage simplifié… Si elle s’adresse à tous, l’offre de services à la personne du Groupe La Poste, baptisée Genius, reprend tous les atouts pour séduire une cible senior. Avec en plus la caution de La Poste pour sécuriser la clientèle. Et bien sûr les services proposés répondent aux attentes des seniors, en particulier des plus âgés : entretien de la maison, assistance informatique et Internet, aide à la mobilité et au transport, soins esthétiques à domicile, petit bricolage, etc. Lire aussi sur ce thème l’interview de Nicole Pochat, directrice marketing et communication Europ Assistance.

Les médias de la relation
La nécessité de segmenter la communication
Retour sur Daxon : la marque a renoncé à l’idée d’un catalogue unique pour ses trois générations de clientes. « On ne peut pas les faire cohabiter dans un même catalogue, explique Catherine Belmont. On a donc tout simplement créé des catalogues différents. On a d’abord sorti l’offre Prêt-à-porter “Grand âge” du catalogue général. On a ensuite fait deux versions du catalogue général : une version “jeune senior” et une version “classique” mais avec une même couverture pour conserver une unicité de marque. » Les changements entre les versions sont à l’intérieur, avec des poses de mannequins différentes ou encore un poids spécifique accordé aux différents secteurs de consommation (détente, lingerie, prêt-à-porter). D’un côté, des pages plus mode pour les jeunes seniors (« je vis ma vie »), la femme mise en avant. De l’autre, des arguments rationnels pour convaincre la cliente classique (« en toute circonstance », « facile d’entretien », valeurs familiales, intergénération).
Les plus de 50 ans sont des générations de l’écrit
Les supports papier constituent un média clé pour s’adresser aux seniors. On peut rappeler que même les plus jeunes d’entre eux ont grandi avant l’explosion de la télévision : la deuxième chaîne n’arrive en France qu’en 1972 et les programmes ne démarrent à l’époque qu’à 19 heures… « 97 % des seniors lisent la presse magazine, 42 % des livres, » illustre Hervé Sauzay, directeur du département Générations et Modes de Vie, de Bayard. Sans oublier que les seniors arrivés à l’âge de la retraite ont du temps pour lire les magazines, consulter les courriers qui leur sont adressés… et comparer. Car les seniors constituent une cible exigeante, expérimentée, rationnelle, qui prend le temps de choisir et de peser les différents arguments. « L’écriture de type marketing direct permet justement de développer les arguments, de montrer les plus produits et les détails, explique Benoît Goblot, directeur général de Senioragency. Les seniors apprécient aussi le marketing direct car ils gardent la maîtrise du processus décisionnel. C’est le média idéal pour argumenter, prouver et accomplir l’acte de vente. Auprès des seniors, les scores des entreprises qui utilisent le marketing direct rencontrent des sommets. »
Mais les seniors vivent aussi à l’heure de la télévision et d’internet !
Les plus de 50 ans sont les plus grands consommateurs de télévision. En moyenne, les plus de 50 ans passent 4h17 minutes chaque jour devant la télé (contre 3h27 pour l’ensemble de la population, selon les derniers chiffres Mediamétrie). Et ils consacrent une autre partie de leurs journées à surfer sur internet ! Toujours d’après Mediamétrie, les plus de 50 ans représentent aujourd’hui 24 % des internautes. En décembre 2007, 7,2 millions d’entre eux se sont connectés, soit 17 % de plus qu’un an plus tôt. Dans le détail, 1,8 million ont consulté un blog (+ 80 %) et 1,3 million ont regardé une vidéo (+ 71 %). Au cours du dernier trimestre 2007, 4,4 millions ont acheté en ligne (+ 23 %).
Dans ce contexte, la télévision qu’a lancé fin 2007 Philippe Gildas pour les seniors se veut un bimedia : chaîne de télé et site web Vivolta.com . Et un autre animateur, Arthur, annonce lui aussi le lancement d’un site web dédié aux baby-boomers, Mageneration. Com. Voilà des seniors bien convoités !
Les seniors prennent les manettes des jeux vidéos
Les seniors deviennent également accros des jeux vidéo. En France, 12 % des utilisateurs de la console de jeu Wii ont plus de 45 ans. C’est la première fois que cette population prend une telle ampleur. Et la marge de progression reste importante : en Angleterre, ils sont déjà 34 % à jouer après 45 ans…


L’ interview de Nicole Pochat, Directrice Communication et Marketing d’Europ Assistance France

"Quelle est votre vision du marché des seniors ?

C’est un marché aussi hétérogène que celui des jeunes. Parler des jeunes, est-ce parler des ados, des pré-ados, des jeunes adultes ? La difficulté est la même pour les seniors. Pour nous à Europ Assistance, il existe trois populations de seniors. Il y a d’abord les actifs, qui n’ont pas atteint l’âge de la retraite, et dont les parents sont encore, le plus souvent, en vie. C’est un critère important pour nous car les personnes de 55 ans sont en recherche de solutions pour la prise en charge de leurs parents qui deviennent dépendants. Deuxième population de seniors : les jeunes retraités. Bien souvent, ils n’ont malheureusement plus leurs parents à charge, mais ils ont du temps, et aussi globalement des revenus, leur permettant de profiter de la vie, avec un certain confort de services. Enfin, statistiquement, la troisième génération de seniors commence pour nous à 78 ans. C’est l’âge où apparaissent les vrais problèmes d’autonomie, nécessitant des services adaptés.

Avez-vous vu des évolutions, pour ces populations de seniors, sur votre activité historique, celle de l’assistance et du rapatriement à l’international ?

Il y a encore une dizaine d’années, notre plateau d’assistance avait une activité très saisonnière, avec trois fois plus d’appels sur les mois de juin, juillet et août. Aujourd’hui, même si ces trois mois restent chargés, nous avons des demandes toute l’année, liées aux seniors qui voyagent en dehors des périodes scolaires. Il n’est plus exceptionnel que nous recevions des demandes d’assistance de personnes de plus de 75 ans sur des treks à plus de 3 000 mètres d’altitude. Je me souviens d’un appel d’une dame de 80 ans qui s’était cassée le col du fémur… en monoski ! Sa première préoccupation face au médecin était de savoir quand elle pourrait remonter sur les pistes. Voilà le senior d’aujourd’hui ! Très actif, mais qui ne se voit pas non plus vieillir. Nous prodiguons des conseils de prudence, incitant par exemple les personnes qui voyagent à consulter leur médecin avant de partir.

Quelles sont les nouvelles attentes créées par le vieillissement de la population ?

Bien évidemment, les services à la personne. Nous avons mené une étude avec TNS Sofres qui montre que l’aide aux personnes qui vieillissent est le service qu’attendent en premier les Français, loin devant l’assistance maternelle par exemple. 72 % considèrent que les services pour les personnes âgées sont les plus utiles. Ce chiffre monte à 85 % chez les plus de 55 ans, qui sont confrontés directement ou indirectement à ce problème. Avant même la dépendance, il y a une forte attente pour de l’aide au maintien à domicile, des aides ménagères, des auxiliaires de vie, la réalisation de petit bricolage à domicile, etc.

Que peut proposer Europ Assistance sur ce marché ?

Il n’y a pas besoin de faire appel à une société d’assistance comme la notre pour trouver une aide ménagère. Ce que nous amenons, c’est un package de services, ainsi que leur coordination qui est un point essentiel. Si l’on regarde nos contrats dépendance, ils comportent un bilan annuel d’autonomie, le plus souvent à partir de 70 ans. Comme je vous le disais, les gens ne se voient pas vieillir et ils se refusent à ne plus mener certaines activités. Notre questionnaire permet de diagnostiquer la perte d’autonomie, et aussi d’en faire prendre conscience nos assurés. Cela permet de déclencher certaines prestations au bon moment. Comme l’installation d’un système de téléassistance ou l’intervention d’un ergothérapeute au domicile pour adapter le logement aux besoins d’une personne dépendante.

Vous accompagnez aussi les enfants des personnes dépendantes ?

Aider des parents en perte d’autonomie peut être un travail à plein temps, très impliquant émotionnellement, très difficile aussi. Nous proposons donc ce que l’on appelle une « aide aux aidants » pour soutenir la famille et lui permettre d’entrer en contact avec des spécialistes. Nous développons aussi un portail de services sur internet qui permet aux enfants de pouvoir consulter l’agenda de leur parent, comme les rendez-vous médicaux, d’avoir accès aux coordonnées de tous les intervenants, de pouvoir poser à des questions à des spécialistes, assistantes sociales, gérontologues…. Il y a une forte attente pour ce type de services très pratiques, très concrets, et rassurants. Nous avons en projet de développer plus encore ce portail de services. Reste néanmoins la question du modèle économique. Car les services à la personne ont un coût. Les payer en direct revient cher, même avec la loi Borloo qui ne couvre d’ailleurs pas toutes les prestations. La solution semble devoir passer par une mutualisation du coût de la prise en charge des personnes dépendances. Mais sur quel modèle ? C’est un vrai défi de société à relever."