Générations à pleins tubes





Il suffit d'observer la pléthore de compilations consacrées à une décennie particulière pour saisir le lien particulier qui unit, de nos jours, musique et sentiment d'appartenance à une génération.

La chanson "Rockollection" de Voulzy (1977) témoigne bien de cette imbrication des souvenirs personnels de jeunesse et des bribes de tubes de l'époque...



Pourtant, en effectuant une simple recherche sur Google Image, l'on s'aperçoit que ces compilations "rétro" ne remontent guère au-delà des années 60, hormis quelques éditions plus spécialisées : à votre avis, comment pourrait-on l'interpréter? Je vous laisse y réfléchir, et éventuellement proposer vos pistes de réponses en commentaire : je suis certaine que cette petite réflexion nous en apprendra beaucoup sur la notion de générations à notre époque...





La question des générations a également inspiré bien des chansons. Je vous propose ici une petite discographie évolutive, que je mettrai à jour au fur et à mesure de mes trouvailles : là encore n'hésitez pas à faire des suggestions... Je joins le texte des chansons à la suite.




En complément de "vingt ans" par Ferré, j'ajoute la magnifique reprise qui en a été faite par Zebda: une preuve que les générations ne s'opposent pas toujours, et que la "génération des 20 ans" reste là-même... à travers les générations!
Voici encore de quoi problématiser cette notion!








Ferré, "Vingt ans" (1969) :

Pour tout bagage on a vingt ans
On a l'expérience des parents
On se fout du tiers comme du quart
On prend l'bonheur toujours en r'tard
Quand on aime c'est pour toute la vie
Cette vie qui dure l'espace d'un cri
D'une permanente ou d'un blue-jean
Et pour le reste on imagine
Pour tout bagage on a sa gueule
Quand elle est bath ça va tout seul
Quand elle est moche on s'habitue
On s'dit qu'on n'est pas mal foutu
On bat son destin comme les brêmes
On touche à tout on dit "je t'aime"
Qu'on soit d'la Balance ou du Lion
On s'en balance on est des lions
Pour tout bagage on a vingt ans
On a des réserves de printemps
Qu'on jett'rait comme des miettes de pain
À des oiseaux sur le chemin
Quand on aime c'est jusqu'à la mort
On meurt souvent et puis on sort
On va griller une cigarette
L'amour ça s'prend et puis ça s'jette
Pour tout bagage on a sa gueule
Qui cause des fois quand on est seul
C'est ç'qu'on appelle la voix du d'dans
Ça fait parfois un d'ces boucans
Pas moyen de tourner l'bouton
De cette radio on est marron
On passe à l'examen de minuit
Et quand on pleure on dit qu'on rit
Pour tout bagage on a vingt ans
On a une rose au bout des dents
Qui vit l'espace d'un soupir
Et qui vous pique avant d'mourir
Quand on aime c'est pour tout ou rien
C'est jamais tout c'est jamais rien
Ce rien qui fait sonner la vie
Comme un réveil au coin du lit
Pour tout bagage on a sa gueule
Devant la glace quand on est seul
Qu'on ait été chouette ou tordu
Avec les ans tout est foutu
Alors on maquille le problème
On s'dit qu'y'a pas d'âge pour qui s'aime
Et en cherchant son cœur d'enfant
On dit qu'on a toujours vingt ans

Brel, "Au suivant" (1964) :


Cette chanson se réfère au service militaire, qui constitua un rite initiatique de passage à l'âge adulte pour de nombreuses générations...

Tout nu dans ma serviette qui me servait de pagne
J'avais le rouge au front et le savon à la main
Au suivant, au suivant
J'avais juste vingt ans et nous étions cent vingt
A être le suivant de celui qu'on suivait
Au suivant, au suivant
J'avais juste vingt ans et je me déniaisais
Au bordel ambulant d'une armée en campagne
Au suivant, au suivant

Moi j'aurais bien aimé un peu plus de tendresse
Ou alors un sourire ou bien avoir le temps
Mais au suivant, au suivant
Ce n'fut pas Waterloo mais ce n'fut pas Arcole
Ce fut l'heure où l'on r'grette d'avoir manqué l'école
Au suivant, au suivant
Mais je jure que d'entendre cet adjudant d'mes fesses
C'est des coups à vous faire des armées d'impuissants
Au suivant, au suivant

Je jure sur la tête de ma première vérole
Que cette voix depuis je l'entends tout le temps
Au suivant, au suivant
Cette voix qui sentait l'ail et le mauvais alcool
C'est la voix des nations et c'est la voix du sang
Au suivant, au suivant
Et depuis chaque femme à l'heure de succomber
Entre mes bras trop maigres semble me murmurer :
"Au suivant, au suivant"

Tous les suivants du monde devraient s'donner la main
Voilà ce que la nuit je crie dans mon délire
Au suivant, au suivant
Et quand je n'délire pas, j'en arrive à me dire
Qu'il est plus humiliant d'être suivi que suivant
Au suivant, au suivant
Un jour je m'f'rai cul-de-jatte ou bonne sœur ou pendu
Enfin un d'ces machins où je n's'rai jamais plus
Le suivant, le suivant

Brel, "Les bourgeois" (1961) :

Le coeur bien au chaud
Les yeux dans la bière
Chez la grosse Adrienne de Montalant
Avec l'ami Jojo
Et avec l'ami Pierre
On allait boire nos vingt ans
Jojo se prenait pour Voltaire
Et Pierre pour Casanova
Et moi moi qui étais le plus fier
Moi moi je me prenais pour moi
Et quand vers minuit passaient les notaires
Qui sortaient de l'hôtel des "Trois Faisans"
On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
En leur chantant

Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient...

Le coeur bien au chaud
Les yeux dans la bière
Chez la grosse Adrienne de Montalant
Avec l'ami Jojo
Et avec l'ami Pierre
On allait brûler nos vingt ans
Voltaire dansait comme un vicaire
Et Casanova n'osait pas
Et moi moi qui restait le plus fier
Moi j'étais presque aussi saoul que moi
Et quand vers minuit passaient les notaires
Qui sortaient de l'hôtel des "Trois Faisans"
On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
En leur chantant

Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient...

Le coeur au repos
Les yeux bien sur terre
Au bar de l'hôtel des "Trois Faisans"
Avec maître Jojo
Et avec maître Pierre
Entre notaires on passe le temps
Jojo parle de Voltaire
Et Pierre de Casanova
Et moi moi qui suis resté le plus fier
Moi moi je parle encore de moi
Et c'est en sortant vers minuit Monsieur le Commissaire
Que tous les soirs de chez la Montalant
De jeunes "peigne-culs" nous montrent leur derrière
En nous chantant

Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux et plus ça devient bête
Disent-ils Monsieur le commissaire
Les bourgeois
Plus ça devient vieux et plus ça devient...

Brassens, "Boulevard du temps qui passe" (1976) :

A peine sortis du berceau
Nous sommes allés faire un saut
Au boulevard du temps qui passe
En scandant notre "Ça ira"
Contre les vieux, les mous, les gras
Confinés dans leurs idées basses.

On nous a vus, c'était hier
Qui descendions, jeunes et fiers
Dans une folle sarabande
En allumant des feux de joie
En alarmant les gros bourgeois
En piétinant leurs plates-bandes.

Jurant de tout remettre à neuf
De refaire quatre-vingt-neuf
De reprendre un peu la Bastille
Nous avons embrassé, goulus
Leurs femmes qu'ils ne touchaient plus
Nous avons fécondé leurs filles.

Dans la mare de leurs canards
Nous avons lancé, goguenards
Force pavés, quelle tempête
Nous n'avons rien laissé debout
Flanquant leurs credos, leurs tabous
Et leurs dieux, cul par-dessus tête.

Quand sonna le cessez-le-feu
L'un de nous perdait ses cheveux
Et l'autre avait les tempes grises.

Nous avons constaté soudain
Que l'été de la Saint-Martin
N'est pas loin du temps des cerises.

Alors, ralentissant le pas
On fit la route à la papa
Car, braillant contre les ancêtres
La troupe fraîche des cadets
Au carrefour nous attendait
Pour nous envoyer à Bicêtre.

Tous ces gâteux, ces avachis
Ces pauvres sépulcres blanchis
Chancelant dans leur carapace
On les a vus, c'était hier
Qui descendaient jeunes et fiers
Le boulevard du temps qui passe.

Saez, "Jeune et con" (2001) :

Encore un jour se lève sur la planète France
Et je sors doucement de mes rêves je rentre dans la danse
Comme toujours il est huit heures du soir j'ai dormi tout le jour
Je me suis encore couché trop tard je me suis rendu sourd encore

Encore une soirée où la jeunesse France
Encore elle va bien s'amuser puisqu'ici rien n'a de sens
Alors elle va danser faire semblant d'être heureux
Pour aller gentiment se coucher mais demain rien n'ira mieux

Puisqu'on est jeune et con
Puisqu'ils sont vieux et fous
Puisque des hommes crèvent sous les ponts
Mais ce monde s'en fout
Puisqu'on n'est que des pions
Contents d'être à genoux
Puisque je sais qu'un jour nous gagnerons à devenir fous

Encore un jour se lève sur la planète France
Mais j'ai depuis longtemps perdu mes rêves je connais trop la danse
Comme toujours il est huit heures du soir j'ai dormi tout le jour
Mais je sais qu'on est quelques milliards à chercher l'amour encore

Encore une soirée où la jeunesse France
Encore elle va bien s'amuser dans cet état d'urgence
Alors elle va danser faire semblant d'exister
Qui sait si l'on ferme les yeux on vivra vieux ?

Puisqu'on est jeune et con
Puisqu'ils sont vieux et fous
Puisque des hommes crèvent sous les ponts
Mais ce monde s'en fout
Puisqu'on n'est que des pions
Contents d'être à genoux
Puisque je sais qu'un jour nous nous aimerons
Comme des fous

Encore un jour se lève sur la planète France
Et j'ai depuis longtemps perdu mes rêves je connais trop la danse
Comme toujours il est huit heures du soir j'ai dormi tout le jour
Mais je sais qu'on est quelques milliards à chercher l'amour

The Who, "My Generation "  (et traduction) :

My Generation (Ma Génération)


People try to put us d-down (Talkin' 'bout my generation)   
Les gens essaient de nous rabaisser ( parlant d'ma génération)
Just because we get around (Talkin' 'bout my generation)   
Juste parce que nous roulons notre bosse ( parlant d'ma génération)
Things they do look awful c-c-cold (Talkin' 'bout my generation)     
Les choses qu'ils font semblent effroyablement déprimantes ( parlant d'ma génération)
I hope I die before I get old (Talkin' 'bout my generation)     
J'espère mourir avant d'être vieux ( parlant d'ma génération)

This is my generation    C'est ma génération
This is my generation, baby    C'est ma génération, bébé


Why don't you all f-fade away (Talkin' 'bout my generation)     
Pourquoi ne disparaissez vous pas tous? ( parlant d'ma génération)
And don't try to dig what we all s-s-say (Talkin' 'bout my generation)     
Et n'essayez surtout pas de piger ce qu'on dit tous ( parlant d'ma génération)
I'm not trying to cause a big s-s-sensation (Talkin' 'bout my generation)     
Là je ne cherche pas à faire une grosse impression ( parlant d'ma génération)
I'm just talkin' 'bout my g-g-g-generation (Talkin' 'bout my generation)
Je parle seulement de ma génération ( parlant d'ma génération)

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